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CÔTES D'ARMOR
Dinan

La route de Saint-Malo longe la Rance qui se resserre et s'encaisse de plus en plus profondément, en gardant pourtant les belles teintes turquoises de lamer,  dont les marées remontent jusqu'à Dinan. Le plus beau moment de la promenade est l'arrivée à Dinan, cité médiévale qui se dresse avec son château et ses remparts sur les bords d'un plateau escarpé.  Un viaduc enjambe la vallée étroite et profonde de la Rance, et nous voici au coeur de la vieille ville.

Des maisons à pans de bois et à encorbellements, dont la construction s'est échelonnée du xivème au xvième siècle,  bordent la plupart des vieilles rues sinueuses. Des places charmantes s'élargissent autour de fontaines ou d'églises, la rue la plus pittoresque restant la rue de Jerzual qui emprunte l'antique voie d'accès à la rivière. Le long de cette rue pavée, dont les marches atténuent de temps en temps la forte pente, s'étagent les plus anciennes maisons de la ville. C'est dans cette rue, dit-on, que Jacques Cartier venait régulièrement rencontrer des mariniers pour les persuader de s’enrôler.

Parla porte Jerzual, au pied du pont gothique, on gagne le joli petit port sur la Rance, d'où l'on exportait, autrefois, la toile à voile. La remontée est rude.  Des ânes,  chargés de paniers, grimpaient cette pente qu'aucune charrette ne pouvait emprunter.

Un peu à  l'extérieur de la ville, rue de la Garaye, on peut visiter, pendant les vacances scolaires, l'ancien couvent des Cordeliers, aujourd'hui lycée-collège privé des Cordeliers, qui fut fondé au xiiième siècle par l'ancêtre du baron Pierre Dubois Davaugour, gouverneur de la Nouvelle-France de 1661 à 1663, c'est-à-dire dernier gouverneur à dépendre de la Compagnie des Cent-Associés.

On pourra évoquer la vieille famille bretonne dont il est issu, en parcourant le cloître gothique du xvème siècle et en admirant les tourelles en poivrière de la cour d'honneur.

Mais c'est au château que l'on sentira le mieux l'ambiance dans laquelle vivaient les seigneurs de Dinan : on y découvre la structure d'un château fort du XIVe siècle,  ainsi qu'un musée d'Arts et Traditions Populaires riche en meubles, costumes et coiffes du pays de la Rance.

Militaire de carrière, Pierre Dubois Davaugour n'avait pas la souplesse d'un diplomate : ses démêlés avec Mgr de Laval sur le problème de la vente d'alcool aux Amérindiens en échanges de fourrures,  achevèrent de mettre le feu aux poudres.  Pourtant, il était consciencieux et intègre.  Les difficultés qu'il rencontra au Canada incitèrent le roi à doter enfin la colonie d'un corps administratif formé pour ce travail, c'est-à-dire un intendant gestionnaire, juriste et administrateur,  comme le sera JeanTalon, et un gouverneur chargé  des questions militaires et de sauvegarde, comme le sera le comte de Frontenac. Auparavant, à l'époque de Pierre Dubois Davaugour, ces deux rôles, confondus en un seul,  étaient trop lourds pour un militaire sans formation administrative.

Au xviième siècle, un fils de Dinan parti pour le Canada est l'ancêtre des familles Gravel.

CÔTES D'ARMOR
Trigavou, Ploubalay, Le Guildo

Regagnons la belle côte découpée à l'ouest de Dinan.  Les rochers y dissimulent des criques, les estuaires y font des brèches couleur d'émeraude au milieu de sa joncs. Notre itinéraire suit la ligne de défense établie par la famille Davaugour tout autour de ses territoires.

À Trigavou, le château du Bois-de-la-Motte, des xvième et xviième siècles, s'élève à l'emplacement de l'ancienne forteresse. Les ruines du château de Guildo,  surveillant l'estuaire de l'Arguenon, rappellent une époque où, avec les Normands puis les Anglais, le danger venait d'abord de la mer.

Les petits villages de Trigavou et Ploubalay présentent encore un autre intérêt, puisqu'ils font partie de ces communes proches de Saint-Malo qui acceptèrent d'héberger desAcadiens réfugiés.  Ainsi, nombre d'Acadiens se sont installés à Ploubalay de 1759 à  1768,  comme l'attestent soixante-cinq actes des registres paroissiaux, et à Trigavou de 1760 à 1774, comme le prouvent également une soixantaine d'actes juridiques.

Les premiers vont gagner Belle-Ile, dans le Morbihan, dès la fin de 1768,  avec une centaine des leurs ; les autres ne partiront qu'au début de 1774 pour Châtellerault, en Poitou, où ils seront regroupés avec quinze cents de leurs compagnons. Durant ce bref séjour breton (qui a dû leur sembler bien long), baptêmes, mariages,  enterrements ont été célébrés dans les églises de ces deux villages. Celle de Ploubalay a été reconstruite au siècle dernier, mais celle de Trigavou existe toujours et constitue une étape émouvante.

FINISTÈRE
Brest

La péninsule de Bretagne, contrairement à ce que l'on a dit souvent, n'a pas été grande pour voyeuse de colons canadiens. Aux xviième et xviiième siècles, un certain nombre de départs se font de ports, comme Saint-Malo ou Nantes,  situés aux deux extrémités nord et sud de la province, mais rarement du coeur même de la Bretagne, soit les actuels départements du Finistère, des Côtes-du-Nord et du Morbihan. À  cette époque, les Bretons de la côte sont pêcheurs mais ne songent pas à s'installer outre-Atlantique. Les Bretons de l'intérieur sont trop attachés à leur terre, à leur langue et à leur culture pour aller s'expatrier dans une colonie d'obédience française, alors qu'ils refusent, chez eux, l'autoritarisme du gouvernement français.

Nous allons donc traverser le Finistère sans y faire d'escales pour nous rendre à Brest. Outre le paysage de bocages bordés de haies d'ajoncs et les petites villes qui se blottissent autour de leurs calvaires et de leurs enclos paroissiaux, la magnifique rade de Brest vaut bien ce déplacement un peu long. La splendeur de la côte déchiquetée, morcelée,  découpée en criques, pointes, falaises, éboulis sur lesquels pousse une végétation de lande, genêts et bruyères, incite à explorer plus longuement ce pays de bout de France. Ici,  se conserve encore intact un certain nombre de traditions bretonnes, comme les pardons de Rumengol (le 25 mars, pour l’Annonciation ; le 15 juin pour la Trinité ; le 15 août pour l’Assomption de la Vierge et le 8 septembre pour la Nativité), de Locronan (deuxième dimanche de juillet),  de Sainte-Anne la Palud (deuxième dimanche après le 15 août), ou encore la fête des fraises de Plougastel (en juin)

La ville de Brest n'est pas à négliger. Presque entièrement détruite pendant la dernière guerre,  elle a été reconstruite en damier.  Il va de soi que l'ancêtre des Quemeneur, dit La Flamme, ne reconnaîtrait pas sa ville natale.

Le château, à l'ouest de la ville, est le seul vestige de l'ancien Brest. Avec ses tours et ses fortifications du xiiième au xviième siècle qui surplombent le port militaire et l'arsenal, il évoque pour nous la figure de Jean-Armand Dieskau, un des plus grands capitaines de son temps, qui en fut gouverneur avant de recevoir au Canada la plus rude leçon de son existence. Nommé commandant des renforts français au Canada en 1755,  il est chargé de repousser les Anglais qui, établis sur les bords du lac Saint-Georges, font peser une menace sur la région de Montréal. Mais il est mal renseigné surlenombre réeldeses ennemis et ne connaît pas assez la mentalité  des Amérindiensquicombattent dans ses troupes. Il est donc battu, blessé et fait prisonnier ; mais son action ralentit quand même l'avance anglaise.

Jean-Armand Dieskau n'était pas le premier à  être victime des conditions très spéciales de la guerre américaine. Comment aurait-il pu en être autrement, alors que les militaires envoyés au Canada n'étaient aucunement préparés au style de guerre qu'il allaient avoir à y mener ?

Le château abrite le musée de la Marine, où sont exposés de belles maquettes de bateaux et d'anciens instruments de marine. En contrebas, cours Dajot,  la promenade construite par les forçats du bagne vers 1765, offre un merveilleux point de vue sur toute l'étendue de la rade. La table d'orientation à l'est permet d'identifier les reliefs et les estuaires de la côte environnante,  telle que pouvait l'admirer Louis Hémon, le fameux auteur de Maria Chapdelaine, lui aussi originaire de Brest.

Souvenir de l’aide canadienne lors de la seconde guerre mondiale, un Monument aux Morts canadien (à Santec, près de Roscoff) commémore les soldats et l’équipage d’un cuirassé canadien coulé par les Allemands au large de la plage de Santec.

ILLE-ET-VILAINE
Châteauneuf-d'Ille-et-Vilaine

Châteauneuf-d’Ille-et-Villaine tire son nom du nouveau château, construit au XVIIe siècle sur un tertre dominant le bourg : le vieux château n'est plus qu'une ruine romantique drapée de lierre au fond de son parc. Tous deux ont pourtant été témoins de deux évènements qui nous concernent : d'abord du départ d'ancêtres des familles Chauvin et Sautier,  et ensuite du triste retour de nombreuses familles acadiennes rapatriées après le « Grand Dérangement », débarquées à Saint-Malo et hébergées, en attendant mieux, dans les petites villes des environs. Châteauneuf–d’Ille-et-Vilaine en reçut pour sa part un certain nombre, puisque plus de quarante-cinq actes les concernant figurent sur les registres paroissiaux - plus souvent de décès que de baptêmes ou de mariages, semble-t-il- mais comment s'en étonner ?

ILLE-ET-VILAINE
Combourg

La Château de Chateaubriand

La Château de Chateaubriand

Combourg, c'est le château du père de Châteaubriand. Dans les Mémoires d'outre-tombe, l'écrivain décrit sa jeunesse dans cette demeure lugubre et romantique au bord de son étang, à la lisière de la forêt et de la lande. Nous évoquerons, bien sûr, l'enfant sensible et le diplomate au jugement sûr qui regrettait la cession des colonies  nord-américaines, en parcourant les couloirs du château.

Mais un autre souvenir attachant et d'ailleurs contemporain de la jeunesse de l'écrivain nous retient : des

Acadiens ont été recueillis à Combourg à la suite du « Grand Dérangement ». La cour avait été très impressionnée par le sort tragique de ces malheureux dispersés à travers le monde pour avoir voulu rester fidèles à leur culture et à leur religion. Le roi,  les ministres citaient leur patriotisme en exemple. Aussi,  quand l'idée prévalut de les incorporer à la classe agricole française, chacun eut à coeur de recueillir un ou plusieurs Acadiens: le ministre de Louis XV, Choiseul, donne l'exemple en accueillant dans son domaine de Chanteloup ; on en réclame alors en Alsace, à Bordeaux, en Normandie et même à Combourg. Le père de Châteaubriand, dont celui-ci a stigmatisé l'avarice dans ses Mémoires, s'est-il laissé toucher par des sentiments humanitaires, ou n'est-ce pas plutôt l'attrait d'une main-d'oeuvre peu coûteuse qui, en la circonstance, a joué ?

ILLE-ET-VILAINE
Dol-de-Bretagne

On a du mal à imaginer que Dol était autrefois (xième siècle) perché sur une haute falaise en bordure de mer.  De la promenade des Douves, on peut voir tout un paysage de polders repris sur la mer , où paissent des moutons qui font le régal des amateurs de prés-salés... Mais le spectacle le plus intéressant est celui de la Grande Rue des Stuarts qui nous plonge en plein MoyenÂge avec ses anciennes échoppes à arcatures.

Un des ancêtres des Durocher, Joseph Durocher, natif de Dol, a connu cette rue commerçante, et prié dans la vaste nef de la cathédrale Saint-Samson (xiième -xiiième siècles).

Ce parcours est assez naturel pour que nous le suivions, nous aussi,  et que nous montions en haut du clocher : on y découvre une vue magnifique et inhabituelle sur le Mont Saint- Michel qui, dit-on à Dol, est l'antichambre du Paradis ...

ILLE-ET-VILAINE
Fougères

Nous arrivons à la ville forte de Fougères avec un personnage bien turbulent: la marquis Troïlus de la Roche de Mesgouez, gouverneur de Fougères,  qui passa sa vie par monts et par vaux,  et bien souvent par mers!  Cet impressionnant décor de douves, de remparts et detours évoque bien la vie aventureuse du brave Troïlus.

Encore tout jeune, il gagne les faveurs de Catherine de Médicis et devient gouverneur de Morlaix en 1565. Fasciné par les pêcheries et les fourrures canadiennes,  il obtient le premier titre de vice-roi de la Nouvelle-France et de gouverneur du pays en 1577. La première expédition canadienne marche à merveille, tandis que la seconde, organisée par les marchands de Saint-Malo et de Saint-Jean de Luz, se solde par un échec.

En France, la situation est de plus en plus mouvementée. Troïlus prend le parti d'Henri III (1574-1589), puis d'Henri IV contre la Ligue, ce parti catholique qui se dressait contre le parti calviniste et voulait renverser le roi au profit du duc deGuise. Chargé de défendre Fougères, Troïlus tombe aux mains desLigueurs qui le retiennent prisonnier pendant sept ans à Nantes.

Dès sa libération, le voici reparti sur les mers, tentant une colonisation de l'île de Bourbon qui échoue, et s'accrochant à son monopole qu'il refuse de céder à  l'armateur Pierre de Chauvin de Tonnetuit de Honfleur.

Fougères évoque bien l'atmosphère de guerre civile, particulièrement vive dans cette région, au moment des guerres de religion. En effet, ville frontière entre la Bretagne et la France,  elle a été  le théâtre constant de l'insoumission bretonne,  qui a toujours fait feu de tout bois pour s'opposer au gouvernement français en place. Ainsi les Bretons,  qui assiègent ces remparts, sont tour à tour Ligueurs contre les Protestants,  insoumis envers le roi Louis XIV,  et finalement Chouans tumultueux contre les révolutionnaires régicides.

De ce passé subsistent les remparts descendant jusqu'à  l'imposant château ceint d'épaisses murailles, entouré de ses douves et couronné de treize tours. En ville, de vieilles maisons du xvième siècle à pans de bois en encorbellement, contemporaines de Troïlus de la Roche de Mesgouez, entourent la place du Marchix et bordent la rue Nançon.

Elles donnent une bonne idée de l'architecture bretonne à l'époque de Jacques Cartier et des premières tentatives d'exploitation du Canada.

À Fougères est également né Jean-Michel de Lespinay, qui servit pendant huit ans à Québec comme capitaine du port sous le comte de Frontenac. Devenu gouverneur de Louisiane, il ne laisse pas un très bon souvenir, étant plus préoccupé de ses intérêts que de ses fonctions.

ILLE-ET-VILAINE
Bruz : le château de Carcé

À  la sortie de la petite ville de Bruz, ce bel édifice de granit,  surmonté de sa tour Renaissance, date du xvième siècle. Récemment restauré par des particuliers,  c'est l'ancienne demeure de l'intendant Claude-Thomas Dupuy qui fit au Canada un séjour assez mouvementé de 1725 à 1728.

Avocat, homme d'étude et homme de loi plutôt qu'administrateur, il rédige toute une série de mémoires sur les relations colonie-colonisé-métropole, mais manque un peu d'habileté, de souplesse et de savoir-faire pour mener à bien sa tâche pratique.

Son séjour va donc se solder par un échec : il aura réussi en moins de deux ans et avec les meilleures intentions du monde, à se mettre à dos toutes les autorités de la colonie qui obtiendront bientôt son rappel en France ...

De retour dans son pays, il se consacre à la science, où il ne tarde pas à  briller, car c'était là sa véritable vocation. Il s'installe au château de Carcé pour mener une enquête sur les eaux de la région. Au Canada, le roi se promet bien de ne plus renouveler une expérience aussi fâcheuse et de nommer dorénavant à l'intendance du Canada un fonctionnaire issu de la Marine et rompu aux travaux administratifs et financiers.

ILLE-ET-VILAINE
Limoëlou-Rothéneuf : Les Portes Cartier,  Manoir de Jacques Cartier.

Si la maison de ville de Jacques Cartier est aujourd'hui détruite, sa maison des champs à Limoëlou, « Les Portes Cartier » plus connue sous le nom de Manoir de Jacques Cartier a, par contre, résisté au temps et aux guerres. C'est une des rares demeures de grand explorateur européen du xvième siècle qui subsiste encore de nos jours.

Situé à six kilomètres de Saint-Malo intra-muros, à la sortie de Rothéneuf, derrière le mur de pierres grises qui l'entoure de toutes parts, le Manoir de Jacques Cartier se profile au milieu des champs depuis plus de quatre siècles.

Un grand porche précède une cour ceinturée de bâtiments: à  droite,  les communs, à gauche, la maison,  avec sa tour encastrée et son lourd toit d'ardoises qui lui donnent des allures de petit manoir, au centre de la cour, un puits carré.

Le corps de logis de gauche, avec ses fenêtres à accolades et ses portes en plein cintre est certainement la partie la plus ancienne du manoir. Celle que Jacques Cartier a acquise le 17 avril 1541. Cette partie comprend une salle commune, une écurie et un four à pain. Il décide de faire agrandir le bâtiment qui prend dès lors un aspect plus élaboré.  Il y fait travailler des charpentiers de marine qui construisent l'escalier autour d'un mât central et donnent à la charpente la forme d'une coque de bateau renversée: ce sont ces caractéristiques architecturales qui font du manoir de Jacques Cartier l'ancêtre des Malouinières, ces demeures de campagne d’armateurs malouins qui firent aux XVIIe et XVIIIe siècle construire leurs maisons par des ouvriers de marine,. Au centre, la tour évoque la Renaissance. La partie droite a été élevée à la fin du xixème siècle, mais avec le souci de ne pas détruire l'harmonie générale.

En 1974, la Fondation Macdonald Stewart acquiert ce manoir tombé en décrépitude et partiellement détruit par les bombardements de le seconde guerre mondiale, et crée Société des Amis de Jacques Cartier dans le but de le restaurer, et ainsi de sauvegarder le demeure du « découvreur » du Canada. Sous le nom hautement symbolique de "Cent-Associés", de grandes entreprises canadiennes, des organismes culturels et éducatifs, mais aussi le gouvernement fédéral du Canada et des provinces canadiennes s’associent   financièrement au projet de restauration du Manoir. Restauré sous le contrôle d’un architecte des Monuments historiques de France, le manoir est inauguré le 19 mai 1984, quelques semaines à peine après le décès de David Macdonald Stewart, président de la Fondation Macdonald Stewart. La rue qui conduit au manoir prend alors le nom de rue David Macdonald Stewart.

Le manoir est désormais ouvert au public. Il abrite un musée évoquant la vie quotidienne de Jacques Cartier et le décors familier d'une demeure malouine du xvième siècle, avec son mobilier.  Une salle pédagogique, la salle du Canada,  présente les voyages de Jacques Cartier et les différentes phases de l'exploration du Canada.

Le 7 juin 1994, à l'occasion du dixième anniversaire de la restauration du manoir, une plaque commémorative en l’honneur de Jacques Cartier a été posée sur le mur du manoir.

Jacques Cartier était le fils de Jamet Cartier et de Jesseline Gensart. Né en 1491, il assista, durant son enfance, aux visites de Louis XII et d'Anne de Bretagne à Saint-Malo.

Comme beaucoup de petits Malouins, il fut d'abord mousse, puis novice et enfin matelot. Il accomplit ainsi ses premiers voyages à Terre-Neuve que les malouins commençaient juste à fréquenter.

Il devint maître de nef et c'est à ce titre qu'il effectua ses voyages au Brésil avec les Portugais (il fut, par la suite, interprète de portugais en 1544 à Saint-Malo). Cependant, il s'était marié en 1520 avec Catherine des Granches, fille du connétable de Saint-Malo.  Allié aux familles Jallobert et Maingard, il devint ainsi l'un des notables de la ville.

En 1532, il est présenté à François Ier, venu en Bretagne pour négocier le rattachement du duché  à la France. La rencontre a lieu au manoir de Brion, à l'instigation de Jean Le Veneur,  abbé du Mont Saint-Michel, et en présence du procureur fiscal de l'abbaye, parent de Cartier.

Le roi confie à Cartier la mission de découvrir des terres nouvelles au nom du roi de France. Ce sont les fameux voyages de 1534, 1535-36, et 1541-42, suite de grandes espérances et de grands déboires qui ouvrent la route du Nouveau Monde à la France.

À son retour, Jacques Cartier reprend la vie d'un simple citoyen de Saint-Malo. Il passe l'hiver chez lui dans sa maison de ville (aujourd'hui détruite) et l'été dans sa résidence de Limoëlou. C'est vraisemblablement à cette époque qu'il rencontre André Thevet. Le récit de ses voyages servira au cosmographe pour la rédaction de sa Cosmographie universelle.

Cartier n'a pas de descendance, mais il sera le parrain de nombreux petits Malouins (plus de vingt). Il remplit aussi de nombreuses fonctions publiques qui nous prouvent l'estime dans laquelle on le tient. Il est tour à tour témoin,  juge, courtier, interprète. Il relève les courants du port,  établit le prix du blé et du pain ... bref, c'est une personnalité que l'on consulte et dont on écoute les avis.

Il meurt le 1er septembre 1557 à Limoëlou lors d'une épidémie de fièvre pesteuse. Il est enterré dans la cathédrale de Saint-Malo.

En revenant vers Saint-Malo, on remarquera, sur le bord de la route de Rothéneuf, la petite chapelle de Saint-Michel des Sablons (signalée par une plaque).  La tradition veut que Jacques Cartier s'y soit recueilli avant chacun de ses départs. À Rotheneuf même, l'ancienne Place du Centre a été renommée le 12 avril 1984, Place du Canada,à l'occasion du 450e anniversaire de la reconnaissance du Canada par Jacques Cartier. La cérémonie solennelle a été suivie de l'inauguration d’un buste de Jacques Cartier (réplique en bronze de la statue du sculpteur Drivier installée en 1934, Place du Canada, à Paris) offert par la Fondation Macdonald Stewart..

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Pleurtuit

Près de Pleurtuit, on peut encore voir le manoir de Pontbriand (XVI è siècle) où  est né, en 1708, Henri-Marie Dubreil de Pontbriand, futur évêque de Québec. Après des études chez les Jésuites de La Flèche, il entre au séminaire parisien de Saint-Sulpice et fait une ascension assez rapide dans la hiérarchie ecclésiastique, ce qui le mène de Bourges à Saint-Malo,  puis en 1740,  à l'évêché de Québec. Il est très vite estimé au Canada, où il se signale par son esprit d'entreprise et ses   nombreuses fondations - dont le fameux séminaire de Montréal.  Son épiscopat va se terminer sous un jour plus noir,  puisqu'il assiste en 1759 à la chute de la Nouvelle-France. Il mourra lui-même en 1760.

Pourtant, sa politique de conciliation avec le gouvernement anglais, selon lui indispensable pour sauvegarder l'Église canadienne et la population, va lui survivre pendant près de cent cinquante ans.

Pleurtuit ne s’est pas contenté de voir naître Henri-marie Dubreil de Pontbriand. Comme de nombreux villages des bords de la Rance (Saint-Suliac, Plouër-sur-Rance, Pleudihen-sur-Rance, Saint-Enogat, Châteauneuf-d’Ille-et-Vilaine, Pleslin, Trigavou, Ploubalay, La Gouesnière…) Pleurtuit a aussi accueilli des Acadiens au moment du « Grand dérangement ». Une quarantaine de familles acadiennes ont ainsi trouvé un agréable refuge non loin des rives de la Rance !

ILLE-ET-VILAINE
Pleven,Vaumadeuc

Le manoir de Vaumadeuc fut la propriété de la famille de Henri –Marie Dubreil de Pontbriand, sixième évêque de Québec de 1741 à 1760, qui donna les derniers sacrements à Montcalm mourant. Il est aujourd’hui devenu un château-hôtel quatre étoiles ;  il séduira tous ceux qui rêvent de s'offrir pour une nuit l'illusion de la vie de château. À l'orée de la forêt de la Hunaudaye commence une étape hors du temps. Comment ne pas être sensible au charme des bâtiments médiévaux   adroitement restaurés ?

Les Pontbriand canadiens sont nombreux. Eh bien apprenez que,  loin d'être des descendants illégitimes du prélat- comme l'avaient imaginé des esprits irrévérencieux-ils appartenaient tout bonnement à sa maison et, de ce fait, portaient son nom.

ILLE-ET-VILAINE
Rennes

La ville, qui a brûlé lors d'un incendie au xviiième siècle, a été reconstruite selon cette ordonnance stricte et sévère que nous voyons aujourd'hui. Néanmoins, autour de la cathédrale Saint-Pierre et particulièrement rue des Dames, rue du Chapitre ou rue Saint-Guillaume,  les vieilles maisons de bois à encorbellement donnent un aperçu du vieux Rennes que connaissait l'ancêtre des Sauriol (Saurieul), Pierre, dit Sansoucy, qui s’est marié à Montréal en 1718. La cathédrale a conservé  ses deux tours de style classique, mais le reste de l'édifice, qui s'était effondré en 1762, a été reconstruit entre 1784 et le milieu du xixème.

L'ancêtre des Sérigny, Julien-Charles, dit Lafleur fut baptisé à côté de la mairie,  à l'église Saint-Germain (gothique flamboyant des xvème - xvième siècles), mais son quartier s'est totalement transformé.  Parmi les monuments que ces deux colons ont connus, citons l'ancien Parlement de Bretagne, qui a souvent soutenu le parti des libertés bretonnes contre l'autoritarisme du pouvoir central.

Ce monument a été édifié entre 1618 et 1655 sur les plans de Salomon de Brosse, l'architecte du Palais du Luxembourg de Paris.

Les « Messieurs du Parlement » étaient des personnages fort en vue à Rennes. Ils avaient souvent des familles très nombreuses. On cite ainsi le cas d'un président qui faisait à peine sensation avec ses trente-deux enfants. Qui s'étonnera, après de tels exemples,  de l'importance des familles canadiennes ?

ILLE-ET-VILAINE
Saint-Malo

« À Saint-Malo, beau port de mer ... » ; tous les petits Canadiens qui connaissaient cette chanson ont essayé, au moins une fois, d'imaginer cette ville fougueuse et indépendante qui traverse l'histoire comme le font ses fameux corsaires,  le sabre entre les dents, mais aussi les coffres pleins de marchandises précieuses et de fourrures.

Saint-Malo est à l'origine une île sur laquelle les habitants de la région se réfugient pour fuir les invasions normandes. On se barricade derrière des remparts épais et les Malouins se rendent bientôt compte qu'ils vont ainsi pouvoir tenir tête au monde entier : « Ni Bretons, ni Français, Malouins ! » est leur devise. Tournés vers une mer pleine d'écueils,  ils prennent chez eux les meilleures leçons de navigation qui soient,  puis s'égaillent vers des contrées lointaines, quand ils ne se contentent pas d'empêcher leurs ennemis héréditaires, les Anglais, de se livrer à un commerce qu'ils entendent bien se réserver !

Depuis la guerre de Cent-Ans, en effet, les Malouins ont eu à défendre continuellement leur citadelle, tandis que leurs navigateurs et leurs corsaires sillonnaient les mers. Car tout naturellement, cette ville de marins qui a elle-même l'air d'un bateau, s'est trouvée engagée dans les grands voyages d'exploration.  Deux Malouins font partie de l'équipage de Magellan en 1520 et c'est, de 1534 à 1542, les trois voyages de Jacques Cartier qui reconnaît la côte occidentale de Terre- Neuve,  laGaspésie, le Saint-Laurent et prend possession du Canada au nom du roi de France.

Des Façades du 18e siècle

Des Façades du 18e siècle

La carrière de Jacques Cartier est mal connue jusqu'à 1532. Lorsque, à cette date, Jean Le Veneur, abbé du Mont Saint- Michel, propose à François Ier de lancer une expédition vers le Nouveau-Monde et avance le nom de Jacques Cartier.  Il fait valoir que ce dernier s'est déjà rendu au Brésil et à Terre- Neuve. De fait, lors de son premier voyage, au départ de Saint- Malo, le 20 avril 1534, Cartier connaît déjà la route de Terre- Neuve. Il sait que sa première étape sera le détroit de Belle- Isle (la baie des Châteaux) et il s'y rend directement. Le but de cette première expédition est clair : il s'agit de trouver une route vers la Chine ou, à défaut et à  l'instar des Espagnols et des Portugais, des pays riches en or.

Jacques Cartier rentre à Saint-Malo le 5 septembre 1534, ramenant deux Amérindiens.  Il n'a,  jusqu'à présent, exploré que le golfe du Saint-Laurent mais, sur l'indication de ces deux indigènes qui le guideront lors de son deuxième voyage, il va apprendre à mieux connaître le pays. Il repart de Saint-Malo le 19 mai 1535 avec trois navires, la Grande Hermine, la Petite Hermine et l'Émérillon, à bord des quels se trouvent plus de cent hommes dont de nombreux membres de sa famille. Cartier arrive dans le golfe du Saint-Laurent cinquante jours plus tard et, conduit par ses deux guides, entreprend la remontée du fleuve qui devrait, d'après les Amérindiens, le conduire au pays mythique du Saguenay,  où  l'on trouve de l'or et du cuivre à profusion.

Après avoir choisi comme lieu de campement la rivière Sainte-Croix (Saint-Charles), Cartier s'embarque sur l'Émérillon et,  malgré l'opposition des Amérindiens,  remonte la rivière jusqu'à Hochelaga, ville fortifiée à la mode iroquoise, près d'une montagne à laquelle il donne le nom de Mont Réal (Mont royal). Puis, ne pouvant poursuivre sa navigation à cause des sauts qui barrent la rivière, Cartier regagne la rivièreSainte-Croix. Ses hommes et lui vont passer un hiver extrêmement difficile, décimés par le froid auquel ils ne sont pas préparés et surtout par le scorbut.

Les péripéties de ce premier hivernement sont entrées dans la légende et sont connues de tous. Nous avons tous en mémoire le pèlerinage organisé par Jacques Cartier à l'image de la Vierge et le vœu qu'il fit de se rendre à Rocamadour si lui et ses hommes réussissaient à regagner la France. On connaît aussi ses dialogues avec les Amérindiens qui lui donnèrent le secret du cèdre blanc antiscorbutique, et lui vantèrent les richesses du Saguenay. Jacques Cartier rentre en France triomphant et communique son enthousiasme au roi François Ier, qui lui donne la Grande Hermine.

Le troisième voyage de Jacques Cartier, retardé  parla guerre entre François Ier et Charles Quint, n'aura lieu qu'en 1541.  Mais les choses ne sont plus aussi simples. Par décision royale,  Jean-François de la Rocque de Roberval, un gentilhomme protestant, est placé à la tête de l'expédition et Cartier se trouve directement sous ses ordres.  Cependant,  le Malouin est prêt à  partir bien avant Jean-François de la Rocque de Roberval qui lui laisse, du moins, prendre les devants.

Cartier remonte à nouveau le Saint-Laurent, fait d'amples provisions de ce qu’il croit être des diamants au « capaux Diamants »  et des feuilles d'or fin.  Malheureusement,  les rapports avec les Amérindiens se sont détériorés et Cartier,  muni de sa cargaison de pierreries, se hâte vers la France afin de célébrer le succès de son expédition. À Terre-Neuve, il croise Jean-François de la Rocque de Roberval qui lui ordonne de revenir sur ses pas avec lui,  mais Cartier profite de la nuit pour prendre le large et le chemin du retour, laissant Jean-François de la Rocque de Roberval livré à lui-même dans sa tentative de colonisation.

La déception de Cartier dut être amère :  l'or et les diamants n'étaient que du mica et de la pyrite de fer;  aussi le succès de l'expédition tourna-t-il au ridicule. D'où l'expression « fauxcomme diamants du Canada ».  Cet échec détourna,  pendant de nombreuses années, l'intérêt des rois de France de cette contrée sans richesse.

Cependant, la voie du Canada n'est pas perdue pour tout le monde.  Marchands et pêcheurs malouins prennent l'habitude de s'y rendre. Leurs disputes avec les marchands des autres ports de l'Atlantique, tels ceux de Rouen et de Dieppe,  qui veulent s'assurer le monopole des fourrures et de la pêche canadienne, marquent la fin du xvième siècle et le début du xviième siècle.

Parmi ces marchands de Saint-Malo se place évidemment au premier rang la famille de Jacques Cartier, les des Granches et les Maingard.

La ville de Saint-Malo,  telle qu'elle nous apparaît aujourd'hui derrière ses remparts,  a connu beaucoup de vicissitudes. Presque entièrement détruite par un incendie au xviième siècle, elle fut reconstruite selon les plans de Vauban. De cette époque subsistent encore quelques hôtels de riches armateurs édifiés, de 1716 à 1725,  le long des remparts. Mais la dernière guerre allait porter un coup très dur à la ville. Les bombardements d'août 1944 ont en effet anéanti la cité en détruisant plus de 2000 logements. Ne démentant pas leur réputation de courage, les Malouins lancent le fabuleux pari de reconstruire leur ville à l'identique tout en la dotant de tous les avantages du confort moderne. C'est ainsi que les bâtiments historiques sont reconstruits pierre par pierre,  tandis que les bâtiments d'habitation élevés le long de rues élargies et d'espaces publics réaménagés, respectent,  par la couleur de la pierre et de l'ardoise, ainsi que par le style et la hauteur des faîtages, les normes des anciens immeubles.  Cette reconstruction s'est échelonnée sur plus de dix années pendant lesquels les patients habitants de la cité ont campé dans des hébergements provisoires aux alentours de Saint-Malo. Leur ténacité a porté ses fruits, Saint-Malo, relevé de ses cendres,est aujourd'hui, considéré dans le monde entier comme le prototype d'une restauration réussie.

La ville n'a dons plus tout à fait l'aspect qu'elle avait au temps de Jacques Cartier. Pourtant, les remparts, le château et la cathédrale faisaient déjà partie du décor du navigateur.

La Statue de Jacques Cartier, sur les remparts de Saint-Malo

La Statue de Jacques Cartier, sur les remparts de Saint-Malo

La cathédrale, dont la nef édifiée vers 1157 précède un choeur du xiiième siècle, fut successivement agrandie au xvème et au xviiième siècle, puis restaurée de 1949 à 1972. Les soubassements de cette cathédrale épousent plusieurs   niveaux   qui correspondent à l'inclinaison du rocher sur lequel elle est construite. Ainsi, le déambulatoire est en contrebas de la nef. C'est dans l'une des chapelles de gauche du déambulatoire que se trouve le crâne de Jacques Cartier, retrouvé  lors des fouilles qui ont suivi les destructions de la dernière guerre. Identifié grâce aux traces de scorbut qui la marquaient,  cette dépouille repose sous une dalle, tandis qu'une plaque murale rappelle le souvenir du grand explorateur. De même, à l'entrée de la nef, une inscription de mosaïque, établie à la fin du siècle dernier, évoque la bénédiction qu'il reçut avant son second départ à la Pentecôte 1535.

Le château, dominé par le grand donjon, construit en 1424, abrite, depuis 1952, le Musée d’histoire de Saint-Malo.  Parmi les collections municipales retraçant la vie des grands hommes et les grandes heures de la cité malouine, une place importante est accordée à Jacques Cartier, le musée réunissant à peu près tous les documents que la ville possède sur le découvreur du Canada. On pourra ainsi y voir des textes et des cartes sur ses voyages,  des manuscrits sur lesquels apparaît sa signature (registres de baptême et actes concernant Limoëlou {1451}), un modèle réduit de la Grande Hermine, des reliques de la Petite Hermine, retrouvées en1843 dans la rivière Sainte-Croix, des plans et des gravures de Saint-Malo aux vième siècle, ainsi que toute une iconographie concernant Cartier lui-même. Face à la mer, sur les remparts une statue du xxème siècle évoque le souvenir de Jacques Cartier. Tous les quatre ans, la course transatlantique Saint-Malo-Québec, instaurée en 1984, à l’occasion des célébrations du 450ème anniversaire de l’arrivée de Jacques Cartier au Canada,  lance ses concurrents sur les traces de Jacques Cartier

Enfin, la Maison du Québec, également inaugurée pour le 450ème anniversaire témoigne de l’amitié qui unit Saint-Malo et le Québec. Tout au long de l’année, elle propose de nombreuses activités culturelles visant à faire connaître le Québec aux Malouins et aux touristes.

LOIRE-ATLANTIQUE
Le Pallet

Roland-Michel Barrin de La Galissonière, né en 1693 à Rochefort, fut commandant général de la Nouvelle-France de 1747 à  1749. Il créa un arsenal et des chantiers maritimes sur le modèle de sa ville natale. Il proposait des plans de défense qui auraient peut-être sauvé la Nouvelle-France s'ils avaient été suivis. À son retour en France, il fit partie de la commission franco-anglaise chargée de régler le problème de l'Acadie.

À  quelques kilomètres de Nantes, au-dessus du village du Pallet, le château de la Galissonnière, dont il ne reste qu’une tour et des dépendances évoque cet officier de marine énergique qui vainquit l'amiral John Byng, en 1756, à Minorque.

Dans son parc, on peut encore admirer les plantes et arbres (magnolias,  tulipiers, sassafras, pins et chênes de différentes essences…) rapportés de ses voyages par La Galissonnière qui était passionné de botanique. De nombreuses espèces proviennent du Canada.

Aujourd’hui, le château accueille des réceptions et des séminaires, et il possède un vignoble de 30 hectares de Muscadet.

LOIRE-ATLANTIQUE
Nantes

Ancienne capitale de la Bretagne,  bien que située à l'extrémité  sud du pays,  Nantes a fière allure avec sa cathédrale,  son château ducal et ses belles demeures des xvème - xviiième siècles.

La ville a longtemps souffert des guerres de religion. Henri IV mit fin à ces dernières en signant, en 1598, l'Edit de Nantes, qui reconnaissait aux protestants la liberté deculte. Cet édit,  Louis XIV devait le révoquer en 1685, contraignant à l'exil la plupart des Protestants français.

Dès le XVIème siècle, Nantes se lance dans le commerce triangulaire qui monnaie le sucre des Antilles contres des esclaves noirs achetés sur la côte de Guinée. Dénoncé par les philosophes, ce commerce du « bois d’ébène », comme il est pudiquement dénommé par les marchands,  fait la richesse de la ville. De gros marchands et d'habiles armateurs amassent des fortunes considérables.  Ils font également circuler les denrées entre les Antilles, le Canada très prisé pour ses fourrures et la métropole. De riches demeures fleurissent un peu partout en ville. On perce la place Royale, la place Graslin, la rue Crébillonet le cours Cambronne. Le long du quai de la Fosse s'installent les bâtiments de la Compagnie desIndes(numéro 70). Les boiseries du xviiième qui ornaient autrefois les murs de l'hôtel ont été, elles aussi, saisies par le goût du voyage : elles sont maintenant exposées dans les salles du Château Ramezay à Montréal, au Canada.

Si Nantes est un centre commercial, c'est également une place tournante importante pour les voyageurs qui, du centre de laFrance,  gagnent les ports d'embarquement de l'Atlantique, comme Saint-Nazaire et surtout La Rochelle. Les voies d'eau que constituent la Loire et ses affluents jusqu'à l'Océan sont beaucoup plus sûres et beaucoup plus rapides que les mauvaises routes de campagne.  Ainsi, tous les colons des recrues de Jérôme Le Royer de La Dauversière gagnent Nantes par le Loir, puis par la Loire à partir de La Flèche.

DeNantes, on a beaucoup émigré vers le Canada et chaque quartier en porte la trace. Le quartier qui entoure la cathédrale Saint-Pierrefut celui de François Dollier de Casson, premier urbaniste de Montréal et le plus célèbre des vingt-quatre Sulpiciens nantais à avoir gagné le Canada.

Les rues de la Juiverie, de la Baclerie et Sainte- Croix, avec leurs maisons du xvème siècle en bois et torchis à moulures sculptées, ont vu naître les ancêtres des Brosseau, des Lespinay, des Bureau et de Jean Deniau qui fut tué par les Iroquois en 1695,  laissant de nombreux enfants qui sont à l'origine de presque tous les Daignault canadiens.

Le plus frappant des monuments de la ville reste le château des ducs de Bretagne où fut enfermé Troïlus de la Roche de Mesgouez, premier gouverneur de la Nouvelle-France, né probablement en 1540. Il avait pris parti contre les Ligueurs qui voulaient renverser le roi HenriIII(1574-1589). Ces derniers le retinrent prisonnier pendant sept ans au château de Nantes. À l'intérieur de l'enceinte,  le musée de la Marine abrite des pièces intéressantes qui évoquent les négriers et les corsaires nantais du xviiième siècle.

Contrairement à la plupart des villes françaises,  Nantes continue de vivre à  l'heure canadienne après 1763.  Port d'accueil pour les Acadiens du « Grand Dérangement », Nantes héberge en 1776 les familles acadiennes qui, à  la nouvelle de la guerre d'Indépendance américaine, ont décidé de regagner la Louisiane, où se sont réfugiés un grand nombre de leurs parents. Hébergées dans la paroisse Saint- Martin de Chantenay,  ces familles attendront leur départ jusqu'en 1785.  Une gigantesque fresque de l'artiste Louisianais, Robert Dafford évoque le souvenir de leur embarquement, rue des Acadiens dans le quartier Sainte-Anne.

Les navires à leur départ de Nantes durent gagner le port voisin de Paimboeuf avant de prendre le large vers la Louisiane. A leur bord se trouvaient 1600 Acadiens qui après vingt ans de vicissitudes et d'errance avaient choisi de repartir de France, espérant retrouver en Louisiane leurs compatriotes bientôt connus sous le nom de Cajuns, déformation du mot Acadiens.

De nombreux Acadiens sont cependant restés à  Nantes et dans la région nantaise. Grâce aux travaux récents des historiens et des associations, leurs descendants sont aujourd’hui bien au courant de leur histoire et de nombreux échanges existent de part et d’autres de l’Atlantique entre les familles acadiennes qui cherchent à retrouver le fil d'une histoire qui les a tellement dispersées.

Deux grands missionnaires acadiens qui avaient suivi les exilés dans toutes leurs pérégrinations sont morts à Nantes : l'abbé Charles de La Goudalie, en 1757, et l'abbé Jean-Louis Le Loutre, en 1772.

les cours Cambronne

les cours Cambronne

D’autres liens ont continué à se tisser entre Nantes et le Canada bien après le xviiième siècle : c'est ainsi qu'à la fin du siècle suivant, Jérôme-Adolphe Chicoyne, Canadien dont les ancêtres sont partis du petit village poitevin de Channay, se retrouve tout naturellement à Nantes. Il vient recruter des Français pour les Cantons-de-l'Est que le gouvernement du Québec désire ouvrir à  l’agriculture.  Il rencontre les familles Mollatet Bécigneul et leur parent, le chanoine Peigné qui voit dans cette proposition une possibilité de débouchés inespérés pour beaucoup de chômeurs. Lechanoine Peigné, curé fondateur de la paroisse Notre- Dame-de-Toutes-Joies, au nord-ouest de la vieille ville, s'occupe,  depuis de nombreuses années,  des problèmes du relèvement de la condition ouvrière. Dans son église, agrandie ces dernières années, on peut aujourd’hui voir une série de vitraux évoquant la fondation nantaise du Canada. Le projet s'est rapidement concrétisé : une société de colonisation, fondée par les familles Bécigneul,  Mollat et Chicoyne,  acquiert des terres au bord du lac Mégantic et entreprend la fondation d'une grande scierie (Channay, aujourd'hui Mégantic). C'est alors que MM. Bécigneul et Mollat font appel à  leurs compatriotes. Deux témoins,  envoyés en éclaireurs, font un rapport si enthousiaste que plus de quatre-vingts personnes de la région nantaise,  en particulier des villages de Saint-Mars-la-Jaille et de Saint-Gildas- des-Bois, à quelques kilomètres au nord de Nantes, se décident à partir. En 1887, les familles nantaises gagnent les bords du lac Mégantic, à la frontière des Etats-Unis.

MAINE-ET-LOIRE
Angers

Leduché d'Angers était autrefois fort puissant.  Il n'a été réuni à la couronne de France que durant le règne de Louis XI, en 1482.  Angers garde néanmoins des allures d'ancienne capitale avec son château fort massif de granit et de grès, sa cathédrale,  ses églises et ses jardins. C'est une ville qui résume bien le climat doux de cette province dont les vins sont fameux.

Capitale administrative, Angers fut également capitale religieuse puisque c'était le siège de l'évêché dont dépendait, entre autres, la ville de La Flèche. C'est pourquoi JérômeLe Royer de La Dauversière dut se rendre à Angers pour exposer ses projets canadiens aux autorités religieuses de sa région, en l'occurrence l'évêque, Mgr de Rueil.

C'est grâce à l'appui de ce prélat que Jérôme Le Royer de La Dauversière put fonder à La Flèche le couvent des Hospitalières de Saint-Joseph, modèle de la future congrégation religieuse de l'Hôtel-Dieu de Montréal. Mgr de Rueil avait beaucoup d'estime pour le courage et la persévérance de La Dauversière, lequel consacrait sa vie à la réalisation d'une oeuvre qui semblait utopique : la fondation d'une ville missionnaire consacrée aux soins et à l'éducation des Amérindiens au coeur du Canada.

À côté de la cathédrale, rue de l'Oisellerie,  l'ancien évêché, dont l'architecture est en grande partie du xiième siècle, abrite au premier étage l'ancienne salle du synode où l'évêque tenait audience. C'est ici que Mgr de Rueil reçut Jérôme Le Royer de La Dauversière au début du mois de mars 1642. Cette belle salle du xiième siècle, avec ses poutres colossales, évoque la magnificence passée des évêques d'Angers. Les murs étaient autrefois recouverts des illustres tapisseries de l'Apocalypse, que l'on peut maintenant voir au musée du château. Lacrypte romane mérite également une visite.

Si La Flèche était sous la dépendance d'Angers du point de vue ecclésiastique, la cité épiscopale subissait en retour l'influence de la petite ville dont le collège jésuite dispensait dans toute la région son rayonnement intellectuel et religieux.  Ainsi, grâce aux Jésuites et au prosélytisme de Jérôme Le Royer de La Dauversière, s'était établi tout un courant d'intérêt pour le Canada, qui devait faire plusieurs émules à Angers.

La paroisse Saint-Martin, avec sa vieille église qui date du xème siècle, est le quartier d'origine de René Goupil. Frère jésuite,  il accompagna les pères Jogues et Couture chez les Iroquois parmi lesquels il exerça son métier de chirurgien. Martyrisé en 1642 par les Iroquois, il devait être canonisé en 1930. Les Bélisle sont originaires du quartierSaint-Michel. Quant aux Delaunay, ils sauront que leur ancêtre, laboureur de son métier, s'est engagé en 1714 pour Trois-Rivières et qu'il a été  baptisé dans l'église du quartier de la Madeleine (sud-est de la ville, direction Saumur par la rue Solney, puis la rue de la Madeleine). Angers est également la patrie des Michelet,  des Marot dont l'ancêtre était soldat, des Bernard, du pâtissier Dupuy et du taillandier Barthélémy Hautin. Parmi la vingtaine d'Angevins qui ont fait souche au Canada,  mentionnons encore Urbain Girard dit Langevin, Marie-Anne Hardy, Anne Rivière, Denis Sabourin dit Chaumier au XVIIe siècle et Jean-Baptiste Brunet, Pierre Bélanger, Joseph Durocher, Charles David, Jean Joutan (ou Juteau) et Philippe Poulin au xviiième siècle.

Le Musée Pincé possède une collection canadienne antérieure au xixème siècle, et typique de la période de la colonisation française. Vous pourrez y voir de nombreux objets réalisés par les Amérindiens canadiens.

MAYENNE
Ruillé-Froid Fonds

De grosses maisons à  toits d'ardoises,  groupées en contrebas de l'église, attestent que le village a connu une certaine prospérité au xviiième siècle. De l'époque précédente, celle où fut baptisé (1627) Hector d'Andigné de Grandfontaine, gouverneur de l'Acadie, il ne reste plus que l'église. Trapue à l'extérieur, elle est à l'intérieur d'une simplicité bon enfant,  avec son devant d'autel naïvement baroque, ses dalles usées et sa nef unique flanquée de deux chapelles.

Hector d'Andigné de Grandfontaine est arrivé au Canada en 1665 comme capitaine d'une compagnie du régiment de Carignan-Salières.  Après avoir participé à  la campagne contre les Agniers, il décide de s'installer au Canada. C'est alors qu'il est nommé gouverneur de l'Acadie et chargé de reprendre en main la colonie acadienne, occupée jusque-là par les Anglais et que le traité de Bréda venait de rendre à la France. Hector d’Andigné de Grandfontaine va donc se livrer à un grand travail de réorganisation sous les directives de l'intendant Jean Talon. L'effort principal porte sur le peuplement : une centaine de colons - dont une partie d'anciens soldats - sont établis en Acadie. C'est certainement l'apport le plus considérable depuis Isaac de Razillyet Charles de Menou d'Aulnay. Un recensement, effectué  en1671, relève environ 400 personnes en Acadie, soit avec les nouveaux colons une population d'environ 500 âmes. Pour pallier l'isolement de la colonie, une route reliant la baie Française au Saint-Laurent par le lac Saint-Jean est peu à peu aménagée,  bordée de seigneuries qui servent de relais. Rappelé en France en 1673, Grandfontaine devait mourir à Brest en 1693. Son mérite personnel a souvent été discuté, mais il fut néanmoins un bon agent de Jean Talon durant toute la durée de son mandat.

MORBIHAN
Auray

Vue d'ensemble depuis les Rampes

Vue d'ensemble depuis les Rampes

Auray, c'est d'abord, pour tous les Bretons comme pour de nombreux Canadiens, l'évocation du Grand Pardon de Sainte-Anne qui a lieu tousles ans, les 25 et 26juillet, à quelques kilomètres du port,  dans le village de Sainte-Anne-d'Auray, siège d'une imposante basilique. Les Canadiens font remonter leur culte pourSainte- Anne à  leurs ancêtres bretons, la mère de la Vierge étant également la patronne de la Bretagne. Il est pourtant plus probable que ce culte ait été implanté au Canada parles Percherons qui fondèrent Sainte-Anne-de-Beaupré;  ceux-ci avaient une ferveur toute particulière pour sainte Anne, vénérée dans le Perche à la Chapelle-Montligeon.

Quoi qu'il en soit, la fête annuelle à Sainte-Anne d'Auray rassemble des centaines de Bretons en costumes et se déroule selon un cérémonial très ancien. Parions que la famille Dugas sera plus sensible encore qu'une autre à ce pèlerinage, car il se déroule dans le village de ses ancêtres, celui-là même dont était également issu Olivier Martin, dit Lamontagne,  engagé pour Ville-Marie par Jérôme Le Royer de La Dauversière en 1653 et tué parles Iroquois en 1661. Après ce spectacle d'une des grandes cérémonies religieuses de Bretagne, le vieux port d'Auray, avec ses maisons du xvème siècle (quartier Saint-Goustan), nous fera poursuivre ce voyage dans le passé. Tout en flânant le long des quais, nous évoquerons sans peine le brouhaha et l'animation de la ville lorsque Isaac de Razilly s'y embarqua, le 23juillet 1632, avec“trois cents hommes d'élite” pour aller s'installer à La Hève, en Acadie.

MORBIHAN
Belle-Ile

Pour les familles acadiennes de la région de Grand-Pré qui débarquèrent à Belle-Ile en 1765, c'était la fin d'un long exode. Ces Acadiens, originaires des paroisses de Saint-Charles-des- Mines et de Saint-Joseph de Rivière-aux-Canards, venaient de vivre les dix années dramatiques du « Grand Dérangement ».  Pour avoir refusé  de prêter serment à la couronne d'Angleterre, les Acadiens ont, en effet, été expulsés d’Acadie parles autorités anglaises à partir de 1755. Dirigés sur la Virginie, qui leur refuse asile, les gens de Grand-Pré  doivent s'embarquer, après de longs mois d'attente, dans des navires de fortune qui n'atteindront pas tous leur destination : l'Angleterre. Là, emprisonnés dans les ports de Liverpool, Southampton ou de Falmouth, les Acadiens connaissent pendant plus de sept ans la misère, la maladie et l'angoisse.

Bien des familles ont été démantelées dans cet exil forcé. Le traité de Paris, en 1763, va cependant mettre fin à  leur captivité. Rapatriés dans les ports français de Morlaix et de Saint-Malo, les paroissiens de Grand-Pré  sont dirigés vers Belle-Ile, tandis que d’autres déportés,  moins chanceux, devront attendre encore dix ans leur installation en Poitou (Ligne Acadienne).

Le domaine de Belle-Ile appartenait en propre à Louis XV. Abandonnée   par sa population et ruinée par l'occupation anglaise(1761-1763),  l'île était, à cette époque,  presque déserte.  Le roi, qui célébrait le courage et la fidélité des Acadiens, avait donc pris la décision d'établir une partie des exilés sur ces terres inhabitées et, fait exceptionnel pour l'époque,  de les leur octroyer en toute propriété.  Chaque concession, faite au nom du roi par les États de Bretagne en 1766, fit donc l'objet d'un contrat en bonne et due forme.  Cet afféagement de l'île impressionna beaucoup à l'époque,  car il était rare que des paysans deviennent ainsi propriétaires de leurs terres.

Cette mesure visait également les autochtones   (500 personnes environ)  qui reçurent des terres dans les mêmes conditions que les Acadiens. Les parcelles furent tirées au sort sous la surveillance du gouverneur militaire de l'île,  le baron de Varenne, et de l'abbé Le Loutre, qui veillèrent à une juste répartition dans les quatre paroisses de l'île. Les afféagistes reçurent ainsi une terre,  des matériaux pour construire une maison avec une étable et une grange, des outils, du bétail et une pension qui devait leur permettre de lancer leur petite exploitation. C'est à cette époque que fut établi « l'État des familles acadiennes de Belle-Ile » (que l'on peut consulter aux Archives départementales du Morbihan établies à Vannes et dans les mairies des quatre communes de l'île). Ce recensement est particulièrement précieux,  car il permet de reconstituer l'histoire et la généalogie - faite de mémoire en 1766 - de chacune des familles acadiennes établies dans l'île. Parmi les réfugiés, de véritables clans familiaux s'étaient reformés à Belle-Ile, tel celui des Granger-Terriot- Daigle, très étroitement unis par le jeu des mariages. Parallèlement, la population autochtone bretonne et la population acadienne,  qui avaient eu au départ quelques difficultés de compréhension (les premiers parlaient breton, les seconds français) et d'adaptation à une vie commune, ne tardèrent pas à mélanger leurs sangs.  C'est ainsi que la majeure   partie de la population actuelle de l'île est d'ascendance acadienne. Certains des patronymes de 1765 ont aujourd'hui disparu, mais les Granger, les Leblanc, les Daigle, les Richard,  les Trahanet les Gaudrot sont encore fort nombreux.

On atteint Belle-Ile par un service régulier de vedettes et de ferrys partant de la ville de Quiberon, à 14 km au nord de l'île. La première vue que l'on a de celle-ci est donc le port du Palais au pied de la citadelle, des bateaux de pêcheurs aux couleurs vives et des maisons basses et blanches aux volets jaunes ou bleus complètent le tableau.

Lacitadelle fut construite en 1549 sur ordre d'Henri II. Parla suite, propriété de Fouquet, surintendant de Louis XIV, elle revint au domaine royal après disgrâce de celui-ci. Derrière la double enceinte et les bastions d'angles, une puissante tour, vestige de l'ancien château, fut occupée durant la dernière guerre par les troupes allemandes.

Le Musée historique de la Citadelle Vauban,  situé dans le bâtiment Louis XIII de la citadelle, abrite une salle réservée aux souvenirs acadiens. On y trouve particulièrement un exemplaire d'une belle édition de l'Évangéline, du poète Longfellow qui raconte de manière émouvante l’épopée acadienne, des tableaux de Claude Picard ainsi que le contrat d'afféagement passé avec les Acadiens.  Sous la voûte de l'hôtel de ville du Palais, une plaque a été posée lors du bicentenaire de l'installation des Acadiens à Belle-Ile. Dans l'église, enfin, la Vierge dorée placée sur la chaire serait, dit la légende, venue d'Acadie.  Elle fut plus probablement offerte par un Acadien à la suite d'un voeu pieux. Au Palais subsiste aussi la maison de la Seigneurie, où les Acadiens ont été abrités, avant d’avoir des maisons.

Quelques-unes des maisons que les premiers Acadiens bâtirent de leurs propres mains à leur arrivée dans l'île subsistent encore de nos jours.  Certaines portent la plaque « 1766 », qui rappelle leur date de construction. Ainsi, celle de Joseph Leblanc, dit Lemaigre, compagnon de l'abbé Le Loutre, qui se signala en ravitaillant la flotte du duc d'Anville en Acadie.  Sa maison est située dans le hameau de Kervaux (commune du Palais)  et porte sur sa façade la date de 1766.  À Antoureau (commune du Palais),  la maison de Joss-Simon Granger est toujours debout. Joss-Simonétait l'un des personnages influents de la colonie acadienne.  Il écrivit de nombreuses suppliques aux autorités (Archives de Vannes et mairie du Palais). À Andestol (commune du Palais)  se trouve la maison de Jean-Baptiste Granger, son frère. À Bortemont (commune de Bangor), la tôle ondulée a remplacé  la paille sur le toit de la maison Terriot. Enfin, les romantiques ne manqueront pas la fontaine des Acadiens, jolie source située dans le vallon de Bormenahic (commune de Locmaria).

MORBIHAN
Vannes

C'est à Vannes que fut signée « l'union perpétuelle entre le Duché de Bretagne et le Royaume de France », deux ans avant le premier voyage de Jacques Cartier au Canada.

De la place Henri IV, que bordent de belles maisons à pignon du xvième siècle,  on gagne la cathédrale Saint-Pierre toute proche. C'est ici qu'a été baptisé Mgr de Pontbriand, le futur évêque de Québec, qui assista le marquis de Montcalm à l'article de la mort sur les plaines d'Abraham.

SARTHE
Bazouges-sur-le-Loir

Arrêtons nous d'abord sur le pont du Loir : c’est ici qu'il faut découvrir Bazouges-sur-le-Loir. Au-delà de la rivière bordée de lavoirs,  c'est tout un foisonnement de toits pointus qui s'élève au milieu des jardins :  le château,  son moulin, l'église,  sa tour,  autour des quels se regroupe le vieux village.

Nous suivons ici le chemin que Jérôme Le Royer de La Dauversière empruntait lorsqu'il rendait visite à  son fils Ignace, alors curé de Bazouges : comme nous,  il montait à travers les rues et les jardins de la petite ville, jusqu'à l'église du xiième siècle qui a gardé sa solide voûte de bois ornée de peintures naïves du xiième siècle.

SARTHE
Chemiré-en-Charnie

Perdu au milieu d'une campagne vallonnée et verdoyante, Chemiré-en-Charnie est un petit village un peu mort, mais son église à elle seule est une excellente évocation du passé. Longue et trapue avec ses toits à plusieurs niveaux et ses contreforts massifs, c'est le type même d'une église de campagne. Rien, semble-t-il,  n'en a été modifié depuis des siècles, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Construite sur le principe des églises percheronnes, sa voûte en bois, soutenue par de grandes poutres transversales, évoque la coque renversée d'un navire.  Des bancs de bois fermés,  un fond d'autel naïf du xviième siècle, quelques statues du xvème siècle dans des niches grossières constituent le mobilier de cette charmante église où tout rappelle les cérémonies d'autrefois.

C'est dans cette église qu'ont été  baptisés les sept colons qui se sont engagés pour Ville-Marie en mars-avril 1653, lors de la première recrue de Jérôme Le Royer de La Dauversière. Deux d'entre eux sont morts sans alliance, dont l'un, Jean Lecomte,  héroïquement aux côtés d’Adam Dollard des Ormeaux, en 1660.

Deux ont laissé  une descendance : Antoine Baudry, dit l'Épinette, cloutier de son métier, qui épouse Catherine Guyard à  Montréal en 1665 et s'installe à Rivière-des-Prairies. Le second, Jehan Auger, dit Baron, s'engage d'abord au service du chirurgien Étienne Bouchard, puis reçoit, en 1662, une concession de Chomedey de Maisonneuve. Sa femme, Louise Girard, le rejoint de France. Tanneur de son métier, il fait rapidement de bonnes affaires,  achète une maison à Ville-Marie où il est bientôt considéré comme un notable.  Père de six enfants, il ne laisse de descendance que par un seul de ses fils, Baptiste.

SARTHE
Clermont-Créans

Clermont est tout proche de La Flèche ; aussi n'est-il pas étonnant qu'une dizaine de Français en soient partis pour Ville- Marie à l'instigation de Jérôme Le Royer de La Dauversière.

Le petit village de Clermont-Créans est aujourd'hui étiré le long de la grand-route, mais sa partie la plus ancienne se trouve un peu en retrait autour de l'église. Quelques maisons au crépi couleur de sable rappellent le passé du village.

Tous nos colons sont nés là, dans l'une ou l'autre de ces vieilles maisons, et ont été baptisés dans cette église, dont la forme s'apparente à celle des églises percheronnes avec sa voûte en bois.

De la recrue de 1653, cinq sont morts sans alliance, mais deux ont laissé une descendance au Canada. Urbain Baudreau, dit Graveline, se marie à Montréal et fait partie de la milice de la Sainte-Famille.  Il demeure à  la côte Saint-Martin, acquiert bientôt des terres en ville et devient procureur syndic de Montréal. Jean Gasteau, après avoir été défricheur au service des autres pendant plusieurs années, se marie en 1667 à Montréal avec Marie-Charlotte de Coppequesne et s'engage lui aussi dans la milice de la Sainte-Famille.  Il se spécialise peu à peu en maçonnerie. Les affaires marchent bien ;  il doit alors engager des aides et ajoute à son métier celui de chaudronnier. Il laisse à sa mort cinq enfants,  des domestiques et des biens assez importants.

La recrue de 1659 ne comprend que deux habitants de Clermont-Créans dont Julien Bloys (Beloy, Blois, Bloye),  cousin de Gasteau, qui part en 1653. Arrivé à Montréal, il se marie deux fois,  fait partie de la milice de la Sainte-Famille et s'enrichit rapidement. En 1713, il possède trois maisons,  des terres à Longue-Pointe etrue Saint-Paul, à Ville-Marie. Ce riche propriétaire va surtout laisser  une descendance féminine.  René Cuillerier, dit l'Eveillé à cause deson activité débordante,  s'engage en 1659 comme serviteur de l'Hôtel-Dieu de Montréal. Enlevé par les Iroquois,  il réussit cependant à s'enfuir au bout d'un an et, de retour à Montréal, épouse Marie Lucault en 1665, dont le père a été tué parles Iroquois. Toute la noblesse de la ville tient à  honorer les héros en étant de la noce. À la création de Lachine,  ils'y installe et devient un des notables. Cultivateur et négociant, il a seize enfants parmi lesquels onze lui assurent une descendance nombreuse sous le nom de Cuillerier et Cuerrier.

Clermont-Créans entretient également des liens étroits avec les nombreux descendants de la famille Lemonnier ( Le Mousnier, Meunier) qui ont il y a quelques années posé une plaque évoquant leurs ancêtres dans l’église à côté des fonts baptismaux. Mathurin Lemonnier est né à Clermont-Créans en 1619, il s’est engagé à La Rochelle en 1644 et s’est marié à Ville-Marie en 1647 avec Françoise Fafard. Un tableau généalogique de la famille Lemonnier  a également été installé dans la salle du conseil municipal de la mairie.

SARTHE
La Flèche

« On ne peut parler de Montréal sans parler de La Flèche ! » dit-on de toute part. Tout a commencé à La Flèche ”, ajoute-t-on, non moins mystérieusement !

Comment cette petite ville française, qui n'est ni un port ni un centre commercial important, a-t-elle pu jouer un rôle dans l'histoire de la grande métropole canadienne?

Le boulevard de Montréal qui nous accueille à notre arrivée à La Flèche ne résout en rien le problème ; mais gagnons donc directement l'hôpital (au nord-est de la ville par le boulevard Jean Moulin et la rue Ravenol) : là, après avoir admiré le beau cloître du xviième siècle, nous pourrons commencer à comprendre les liens qui unissent les deux villes. Nous sommes dans l’ancien couvent des Visitandines qui abrite aujourd’hui les Hospitalières de Saint-Joseph,  chez qui l'on conserve le portrait d'un fondateur,  somme toute,  assez exceptionnel : Jérome Le Royer de La Dauversière dont les religieuses vous raconteront elles-mêmes l’aventure fléchoise, si vous les prévenez de votre visite.  Jérôme Le Royer de La Dauversière est en effet à l'origine de tout. Né à LaFlèche en 1597, il est l'un des premiers élèves du Collège Royal où  enseignent des missionnaires jésuites qui reviennent du Canada ou rêvent de s'y rendre. C'est là qu'il prend connaissance des Relations desJésuites de la Nouvelle-France, lettres annuelles des pères jésuites du Canada à leurs maisons de France.

Ses études finies, Jérôme Le Royer de la Dauversière, bien que très pieux, ne se consacre pas du tout à la vie religieuse. Il se marie, a plusieurs enfants et exerce sa profession de percepteur.  Bon bourgeois tranquille, sa vie s'écoule simple et sans histoire, lorsqu'un événement extraordinaire en bouleverse tout à coup le cours en 1630. Jérôme Le Royer de La Dauversière a soudain la certitude qu'il doit fonder un ordre de filles hospitalières au service des pauvres et des malades.  Il lui faudra ensuite établir une colonie d'habitants et un Hôtel-Dieu, desservi par ces hospitalières, qui soigneront et éduqueront les Amérindiens dans l'île de Montréal, au Canada.

Au premier abord, ce projet semble utopique : Jérôme Le Royer de la Dauversière n'a jamais vu l'île de Montréal, il est sans influence et sans argent. Qui plus est,  l'île de Montréal a déjà un propriétaire : la Compagnie des Cent-Associés. Pourtant, Jérôme Le Royer de La Dauversière va poursuivre inlassablement son oeuvre qu'il mettra plus de trente ans à réaliser. Ilcrée d'abord à La Flèche un couvent qui emploie,  pour commencer,  trois Hospitalières ; c'est la base de lanouvelle institutionqui enverra plus tard ses religieusesauCanada. Parallèlement,  il réussit à convaincre son confesseuretson évêquede l'utilité de son projet. Il rencontre alors à  Paris l'abbé  Olier,  futur fondateur du séminaire deSaint-Sulpice, quiest,  commelui, passionné par les missionscanadiennes. Tous deux décident aussitôt de fonder une compagnie, la Société desAssociés de Notre-Dame de Montréal, qui aura pourbutde financer l'entreprise. En1640,  aprèsdelongs travaux d'approche,  l'îlede Montréal est enfin cédée à la Société des Associés, qui, peu à peu,  comptede nouveaux membres très fortunés,  enthousiasmés par le projet.

C'est ainsi que,  de 1641 à 1663,  Jérôme Le Royer de la Dauversière va pouvoir faire partir les premiers fondateurs : Jeanne Mance, l'infirmière, Marguerite Bourgeoys, l'enseignante, et Paul de Chomedey de Maisonneuve, le chef de l'expédition, ainsi que des hommes et des femmes de la région fléchoise destinés à peupler cette ville missionnaire, fondée « sans esprit mercantile ni de lucre ». En1641, il envoie ainsi une « recrue » de trente-sept hommes. En 1642, c'est la fondation de Ville-Marie, dans l'île deMontréal.  En1643, nouvelle recrue de douze hommes, mais le plus fort recrutement se fait en 1653. Ville-Marie, maintenant créée depuis dix ans, est mise en péril par des attaques incessantes des Iroquois ; il faut donc des hommes pour la défendre. Jérôme Le Royer de La Dauversière se met donc à  parcourir la campagne fléchoise.  Il raconte son entreprise, explique la nécessité d'envoyer des hommes et des familles nouvelles. Il montre la grandeur de l'oeuvre et la possibilité  pour chaque homme courageux de se faire là-bas une place à sa mesure, en servant un dessein d'une haute élévation morale et religieuse. Un contingent de cent soixante-trois hommes et femmes quitte alors La Flèche et la région fléchoise pour venir peupler Ville-Marie. En 1659,  nouveau départ,  auquel   se joignent une dizaine de familles de Marans, en Charente- Maritime.

Enfin,  en1663, la petite cité canadienne est prête à accueillir cet hôpital pour lequel l'ordre des Hospitalières de Saint-Joseph a été créé.  Ainsi,  Jérôme Le Royer pourra, quelques mois avant sa mort, voir partir ses trois premières Hospitalières missionnaires:  Judith Moreau de Brésoles, Catherine Macé et Marie Maillet, réalisant enfin son vieux projet.

Chez les Hospitalières de Saint-Joseph, on vous racontera en riant ce premier départ. La population de La Flèche, parents, amis, malades, et même les compagnes des religieuses, étaient hostiles à leur départ pour le Canada. Les religieuses furent obligées de s'enfuir, de nuit, à cheval, pour gagner leur lieu d'embarquement.

Une gravure du xixème siècle évoque cet épisode romanesque dans le parloir des religieuses. Ces dernières conservent précieusement le livre que les trois religieuses signèrent à leur départ. Chacune des signatures est suivie de la mention: « Contre l'avis de la Communauté » !

Parmi les documents fort intéressants conservés au couvent, vous pourrez aussi consulter les listes des recrues de Jérôme Le Royer de La Dauversière. De La Flèche même sont partis, en 1653 : le soldat Pierre Bareau, le chirurgien Louis Chartier, le boulanger François Hudin,  le tailleur d'habits Michel Bouvier ; en 1659,  Étiennette Alton.  Tous étaient natifs de la paroisse Saint-Thomas,  qui était également celle de Jérôme Le Royer de La Dauversière. L'église, maintes fois remise à neuf au cours des âges,  abrite encore la statue de Notre-Dame du Chef-du-Pont devant laquelle, comme l'indique une plaque commémorative, venait souvent prier   JérômeLe Royer. Un peu plus loin, rue de La Dauversière, on peut voir (mais non visiter) la maison (signalée par une plaque) où  il vécut et mourut, sans jamais gagner ce Canada qui occupait toutes ses pensées. Une statue de Jérôme le Royer de la Dauversière a été érigée dans le parc de la Flèche. Cette statue le montre regardant vers Port-Luneau (lieu de départ des colons).Dans le jardin des Carmes, un buste a également été élevé en 1986, lors du 350ème anniversaire de la fondation des Religieuses Hospitalières de Saint-Joseph... Mais le plus beau monument de La Flèche est sans aucun doute le Prytanée militaire, ancien collège des Jésuites où JérômeLeRoyer de La Dauversière ainsi que Mgr de Laval,  premier évêque de Québec, firent leurs études. Visitez sur tout la chapelle Saint-Louis qui est grandiose : construite en 1607, ses orgues sont également de l'époque de Jérôme Le Royer de La Dauversière et deux plaques y rappellent le souvenir du fondateur de Montréal et celui de l'évêque de Québec.

D'autres colons, gagnés à la cause de Jérôme Le Royer de La Dauversière, ont quitté  les faubourgs de La Flèche. De Saint-Germain, au nord de la ville (rue Saint-Germain), sont partis deux amis, Urbain Brossard et Michel Bouvier. Ils ont exercé ensemble leur métier de maçon à Montréal et ont laissé tous deux une nombreuse descendance. Le serrurier Julien Averty, qui se marie en 1677 à La Prairie avec Jeanne Lecomte vient aussi de Saint-Germain. De Sainte-Colombe, où l'église a subi   de nombreuses modifications, sont partis Jacques Boivin, donné aux Jésuites, René Bellanger, couvreur-maçon, et Pierre Martin, dit Larivière, qui fut tué par les Iroquois. De Pringé, est venu Jean Cadieux qui s'est marié à Montréal en 1663 et de Malicorne- sur-Sarthe,  Pierre Desautels dit Lapointe qui, lui, a trouvé femme en 1666 à Montréal.

Un petit détour par Port-Luneau, sur le bord du Loir fait revivre une des étapes du périple des engagés de la grande recrue de 1653. C’est en effet de là que les colons gagnaient par voie d’eau Saint-Nazaire où La Rochelle, d’où ils partaient pour la Nouvelle-France. Une plaque datant de 1954 indique le lieu exact de leur embarquement.

La toponymie de La Flèche porte de nombreuses traces des liens qui l'unissent à Montréal et au Canada (boulevard de Montréal, boulevard de Québec,  rue Chomedey de Maisonneuve,  rue du Saguenay,  rue des Hurons,  rue des Erablières,  place de la Nouvelle-France et allée Jeanne Mance, allée Ville-Marie, allée Chicoutimi,  allée du Saint-Laurent,  allée de Trois Rivières, allée des Laurentides…). D’autre part, La Flèche est jumelée avec Saint-Laurent du Canada. L’office de tourisme de La Flèche détient une liste de pionniers consultable, et est toujours ravi d’accueillir leurs descendants.

SARTHE
Le Lude

Le Lude est surtout célèbre pour son château Renaissance sur le bord du Loir et les démêlés de la famille Daillon avec le roi de Franceau xvème siècle. Mais pour nous,  les rues étroites et les maisons basses de la petite cité,  groupées autour de son église romane du xiième siècle, l'égliseSaint-Vincent, évoquent une autre aventure. Celle de deux jeunes gens de moins de vingt et un ans : Jean Valliquet, dit Laverdure, fils du notaire du Lude, et Mathurin Langevin, dit Lacroix, son cousin,  qui s'engagent en 1653 dans la recrue que Jérôme Le Royer de La Dauversière lève pour envoyer des renforts à Ville-Marie.

Quels arguments ont bien pu décider ces deux jeunes gens, de famille relativement aisée ? Ceux-là mêmes qui ont convaincu tous les membres de la recrue et que Jérôme Le Royer de La Dauversière a répétés inlassablement dans tous les villages de la région fléchoise : les engagés sont en quelque sorte les « croisés » deVille-Marie. Ils ont pour rôle de faire vivre la ville missionnaire en la défendant contre des Iroquois, mais aussi en y fondant leurs familles, en y exerçant leurs métiers et en y cultivant le sol.

Ainsi, Jean Valliquet va exercer sa profession d'armurier à  Ville-Marie et tout en étant caporal de la milice de laSainte-Famille que Paul de Chomedey de Maisonneuve fonde en 1663 pour assurer la sécurité des habitants. Il se marie bientôt et, grâce à ses huitenfants, est à  l'origine de toutes les familles Valliquette canadiennes.

Quant à  Mathurin Langevin, il a été baptisé  à  l'église Saint-Vincent, sous les belles voûtes de style angevin. À Ville- Marie, il fait aussi partie de la milice de la Sainte-Famille comme presque tous les hommes valides de la ville.  Il joue ensuite un rôle dans les affaires publiques du futurMontréal en devenant syndic des habitants. Ses nombreux descendants sont connus sous les noms de Lacroix et de Langevin.   

SARTHE
Sablé-sur-Sarthe, Solesmes

Ces deux villages,  situés à trois kilomètres l'un de l'autre, forment de chaque côté de la Sarthe un bel écrin pour l'abbaye de Solesmes. De la terrasse du jardin public de Sablé, on découvre une vue magnifique de cette abbaye, dont le nom est lié à la restauration du chant grégorien. Les bâtiments qui se mirent dans la rivière sont des xviiième et xixème siècles, mais l'église paroissiale,  dont la nef unique est en partie carolingienne, a vu partir les trois colons qui se sont joints à la recrue de Jérôme Le Royer de La Dauversière, en 1653.

Sur ces trois hommes, deux ont été tués par les Iroquois : Jacques Nail, laboureur, alors qu'il travaillait près de Ville-Marie, et Nicola Jousselin, au côté d’Adam Dollard des Ormeaux,  en 1660. Un seul d'entre eux, Pierre Chauvin, dit le Grand Pierre, a laissé  une postérité. Meunier de son métier,  il exerce d'abord pour Ville-Marie, puis s'installe à son compte.

À  Sablé,  nous retrouvons également trois colons.  Ici, l'église s'appelle Notre-Dame. Pierre Papin est né dans le faubourgSaint-Nicolas (rue Saint-Nicolas, au sud-est de la ville) ; il s'engage comme défricheur et fait partie de la milice de la Sainte-Famille. Il a sept enfants qui lui assurent une nombreuse descendance. François Roisné est, lui aussi, défricheur et milicien, mais son nom ne se perpétue pas, car il n'a que trois filles. Quant à Pierre Bouze, lui aussi cultivateur, il se décide finalement à rentrer enFrance,  les conditions de vie étant vraiment très dures à Ville-Marie, où l'on vit dans l'angoisse perpétuelle d'une attaque iroquoise.

SARTHE
Saint-Cosme-en-Vairais

Decevillage,  quipar sa situationgéographiqueest encoresous l'influence de Mortagne, sont partis une vingtaine decolons recrutés par Noël Juchereau et Robert Giffard de Moncel. Grâce aux travaux de Madame Pierre Montagne dans les archives des notaires de la région,  tous ont pu être identifiés. L’Association Perche-Canada a posé une plaque intitulée « je me souviens » portant les noms des colons partis au 17è siècle dans l'église où ils furent baptisés, et où avait déjà été installée une première plaque en leur mémoire en 1952.

L' église de Saint-Cosme-en-Vairais

L' église de Saint-Cosme-en-Vairais

Il s'agit de Florent et Gervais Bisson ( ou Buisson) avec leurs épouses JeanneYvon et Marie Lereau,  cette dernière native aussi de Saint-Cosme ; Claude Bouchard, tailleur d'habit (une plaque signale sa maison natale, rue Nationale),  qui épouse Louise Gasnier à Québec en 1654   et son amiJulien Fortin,   dit Bellefontaine,  qui   exerce la profession de boucher et se marie avec Geneviève Gamache à Québec, en 1652; François Garnier, dit Pellerin, qui épouse Jacqueline Freslon à Québec, en1663;  Pierre Gasnier(Gagné) et sa   femme, Marguerite Rosée ; Simon Lereau, qui épouse Suzanne Jaroussel à Québec,  en1635 ; Jeanne Maslier (Malier), épouse de Michel Roullois de Saint-Cosme (1630) ; Pierre Maufay,  qui épouse Marie Duval à Québec en 1654 ; Marie et Simon Rocheron,  qui épouse Mathurine Bisson à Château-Richer, en1663;  Antoine Rouillard, dit Larivière, charpentier, qui épouse Marie Girard à  Québec en 1653 ; Jean Royer, époux de Madeleine Dubois, puis de Marie Targer. Le hameau de Champaissant, aujourd'hui réuni à Saint-Cosme,  estlapatriede JacquesDodier,  quiépousa CatherineCaron,  en1662, à Château-Richer,  etdeCharles Poulliot, charpentier, qui épousa Françoise Meunier,  en1667, au Canada.

Saint-Cosme est jumelé avec Saint-Nicolas du Québec, et les relations des deux villes sont très chaleureuses. Régulièrement, des rencontres sont organisées, et de plus, de nombreux canadiens viennent en « pèlerinage » à Saint-Cosme, pour retrouver les traces de leurs ancêtres. Ainsi, en 1995, une trentaine de Gagné canadiens sont venus visiter Saint-Cosme, suivis l’année suivante par une vingtaine de représentants de la famille Fortin. Enfin, Saint-Cosme a accueilli la première édition du festival Euroquébec en 1998.

D’autre part, une plaque commémorative a été posée rue Nationale sur la maison qui abritait l’ancienne auberge du Cheval Blanc. C’est là que Noël Juchereau et Robert Giffard de Moncel rencontraient les habitants de Saint-Cosme pour les convaincre de partir au Canada. Aujourd’hui, le petit village endormi de Saint-Cosme est fier de ses descendants canadiens. Une rue a été rebaptisée rue du Québec et en1996,  l'école du village a été nommée école Claude Bouchard, en l'honneur de l'ancêtre commun de tous les Bouchard du continent nord-américain; ce qui représente une belle descendance puisqu'il sont des milliers aujourd'hui !

VENDÉE

La nationale 137, qui va de Nantes à La Rochelle, traverse la Vendée de part en part. Le paysage pittoresque et varié  du bocage découpe la campagne en une multitude de parcelles entourées de haies vives. Les petites routes qui s'enfoncent entre les champs ont repris le tracé des anciens chemins creux, où il était si facile de tendre une embuscade. Des villes et des villages aux noms chantants se succèdent le long de ce parcours qui joue à cache-cache avec les clochers.

Saint-Hilaire-de-Loulay est la patrie des Bourassa, dont l’ancêtre, François, s’est marié à Chambly en 1684. À Montaigu, c'est à l'église Saint-Jean, au pied du château en ruine qui domine la masse des maisons étagées au bord de la Maine,  que furent baptisés, à la fin du  xviième siècle,  les jeunes Nepveu,  Mignoneau,  Deschambault et Fédéau. À huit kilomètres de là,  l'ancêtre des Moreau a été  baptisé  à l'église Notre-Dame de Vieillevigne. Le premier Crespeau est parti de Saint-Vincent- Sterlanges. Saint-Philbert–du-Pont-Charrault est la patrie des Allaire et Saint-Fulgent celle des Rémotet d'une autre branche des Bourassa. Quant à Saint-André-Goule-d'Oie,  situé à cinq kilomètres à l'ouest,  son nom pittoresque ravira sûrement les Cottan qui en sont originaires. Le village Les Essarts, avec son château fort en ruine, au pied duquel est né le premier des Giraudeau, clôture notre promenade dans le bocage.

Et tout à coup, nous voici dans la plaine: le bocage s'ouvre sur d'immenses champs de blé qui encerclent Fontenay-le-Comte et Luçon : Fontenay-le-Comte, première métropole de cette grande plaine, a connu son âge d'or sous le règne de François Ier (1515-1547). La ville s'est alors constellée d'hôtels et de maisons Renaissance : place Beillard, rue de la Chèvre,  rue Guillement. Les ancêtres d'une partie des Michaud et des Drapeau ont été baptisés dans l'église Notre-Dame, reconstruite au xivème siècle sur une ancienne crypte romane du xième siècle. Un ancêtre des Gourdon est également originaire de Fontenay-le-Comte,  mais les documents ne précisent pas sa paroisse.

Richelieu fut évêque de Luçon : il y fonda le séminaire. Il habitait le palais épiscopal tout proche de la cathédrale gothique Notre-Dame, dont le clocher-porche (façade) a été refait sous Louis XIV.  Dans l'ensemble,  la petite ville n'a pas beaucoup changé  depuis l'époque où le charpentier Daunais l’a quittée ainsi que les fondateurs des familles Fouilleau et Frenier. Le premier Boissy fut, quant à lui, baptisé à l'église Sainte-Croix.

Promenade en barque dans le Marais Poitevin

Promenade en barque dans le Marais Poitevin

Au-delà  deLuçon,  nous entrons dans une zone très attachante : le Marais Poitevin. Pour bien apprécier sa verdeur mouillée et douce, il faut laisser ici la voiture et embarquer sur l'un de ces petits bateaux à fond plat (les « plates ») dont usent aujourd'hui encore les riverains et les maraîchers- pêcheurs du Marais. Comme leurs arrière-grands-pères du xviième et du xviiième siècle, ils connaissent tous les méandres dece labyrinthe aquatique. Avec eux, nous allons pénétrer dans un espace autrefois envahi par la mer, puis peu à peu conquis par l'homme au moyen d'un système de drains et de canaux qui rappellera sans doute aux Acadiens les canaux et les aboitaux des provinces maritimes canadiennes. Faut-il préciser que dans leur grande majorité les Acadiens sont d'origine poitevine?

On peut embarquer à Maillezais, dont la célèbre abbaye romane a vu partir le colon Michel, où à Arçais,  Coulon, Le Mazeau et Saint-Hilaire la Palud, au sud-est du Marais.

Rendons-nous maintenant de Luçon à  Talmont Saint-Hilaire ; c'est là, au pied du château en ruine du xième siècle, que sont nés un Tripier et un Benoit.

Les hauteurs toutes relatives de la forêt de Vouvant vous feront pénétrer dans l'univers enchanté de la fée Mélusine qui, dit-on,  hante ces lieux. Mais vous avez plus de chance d'y trouver le petit village de la famille Gingras, Saint-Michel-le-Cloucq.  Les deux frères Gingras, Charles etSébastien,  tous deux cultivateurs, l'ont quitté au xviième siècle. Puis Foussais-Payré et sa petite église romane, où fut baptisé un membre de la famille Drapeau.

Enfin, en revenant vers le sud, on découvrira à la lisière du Marais le cloître roman du xième siècle d'une des plus célèbres et plus anciennes abbayes romanes de la région, Nieul-sur-l'Autise. Les ancêtres des Brodeur et des Delavigne ont appris le maniement de la perche sans savoir qu'ils se préparaient ainsi aux courses en canot sur les rivières canadiennes.